vendredi 10 avril 2009

Mont Athos au Petit Palais


à signaler

Une exposition exceptionnelle
«Le mont Athos et l’Empire byzantin.

Trésors de la Sainte Montagne».


Du 9 avril au 5 juillet 2009,
Musée des beaux-arts de la Ville de Paris,
au Petit Palais (avenue WinstonChurchill, 75008 Paris).
Tous les jours de 10 heures à 18 heures (sauf les lundis et jours fériés);
nocturne le jeudi jusqu’à 20 heures.

Accessible aux personnes handicapées.

* * *

Une théologie de la présence
MUSÉE DU PETIT PAL AIS

Le Christ Pantocrator. Icône biface 1360-1380. Monastère de Pantocratos.


La Vierge Hodegetria (détail). Icône du XIV siècle. Monastère de Vatopédi.


« Il n’y a jamais de source de lumière sur les icônes car la lumière est leur sujet, on n’éclaire pas le soleil. On peut même dire que la contemplation de la Transfiguration enseigne à tout iconographe qu’il peint beaucoup plus avec la lumière qu’avec les couleurs. Même en termes techniques, le fond d’or de l’icône s’appelle “lumière”, et la méthode picturale, la “clarification progressive”. En traitant un visage, l’iconographe le recouvre d’abord d’un ton sombre ; ensuite il met par-dessus une teinte plus claire obtenue par l’addition au mélange précédent d’une certaine quantité d’ocre jaune, c’est-à-dire de lumière. On répétera plusieurs « Un manuscrit du mont Athos insiste sur “la prière avec fois cette superposition de tons de plus en plus illuminés. des larmes, afin que Dieu pénètre l’âme” de l’iconographe, Ainsi l’apparition d’une figure suit une progression qui reproduit et conseille “la crainte de Dieu, car c’est un art divin, transmis la croissance en l’homme de la lumière. à nous par Dieu lui-même”. (…) “Nous réfléchissons comme dans un miroir la gloire du Seigneur” : Disons l’essentiel : pour l’Orient, l’icône est un des sacramentaux, une icône est ce miroir tout ruisselant de l’attribut majeur plus précisément celui de la présence personnelle. Le stichère de gloire : la lumière. L’art étonnant de Roublev dans sa divine (NDLR : chant intercalé dans les psaumes) des vêpres de la fête de Trinité traduit l’éclat trisolaire qui illumine le monde. Selon saint Notre-Dame de Vladimir le souligne : “En contemplant l’icône, tu dis Grégoire Palamas, la lumière du Thabor, la lumière contemplée avec puissance : ma grâce et ma force sont avec cette image.” (…) par les saints et la lumière du siècle futur sont identiques. (…) Le Concile de 860 affirme dans le même sens : “Ce que l’Évangile Les nimbes qui entourent les têtes des saints sur les icônes ne sont nous dit par la parole, l’icône nous l’annonce par les couleurs point des signes distinctifs de leur sainteté, mais le rayonnement et nous le rend présent.” (…) de la luminosité de leurs corps. (…) Certes, l’icône n’a pas de réalité propre ; en elle-même, La fusion de l’élément artistique et de la contemplation mystique elle n’est qu’une planche de bois ; c’est justement parce qu’elle tire inaugure une théologie visionnaire. La vision, ici, exprime la foi toute sa valeur théophanique de sa participation au “tout-autre” au sens où saint Paul nomme celle-ci “vision de l’invisible” (Hb 11, au moyen de la ressemblance, qu’elle ne peut rien enfermer 1). L’icône s’adresse aux yeux de l’esprit pour qu’il contemple les en elle-même, mais devient comme un schème de rayonnement. “corps spirituels” (1 Co 15, 44). Le style ecclésial filtre toute visionL’absence de volume exclut toute matérialisation, l’icône traduit subjective, car c’est l’Église qui voit l’objet de la foi, ses mystères.une présence énergétique qui n’est point localisée ni enfermée, Si l’architecture sacrée du Temple ordonne l’espace, et le Mémorialmais rayonne autour de son point de condensation. liturgique, le temps, l’icône expérimente sur l’invisible. (…) L’état deC’est cette théologie liturgique de la présence, affirmée dans le rite grâce, enseigne saint Séraphin, illumine pour faire voir la lumière.de la consécration, qui distingue nettement l’icône d’un tableau à L’icône la révèle à tous ; prière, elle purifie et transfigure sujet religieux et trace la ligne de démarcation entre les deux. (…) à son image celui qui la contemple ; mystère, elle enseigne qu’il y a une œuvre d’art est à regarder, elle ravit l’âme ; émouvante là le silence habité, la joie du ciel sur la terre, l’éclat de l’au-delà. » et admirable à ses sommets, elle n’a pas de fonction liturgique. Or, l’art sacré de l’icône transcende le plan émotif qui agit par la sensibilité. (…) L’artiste s’efface derrière la Tradition qui parle, les icônes ne sont presque jamais signées ; l’œuvre d’art laisse place à une théophanie ; tout spectateur à la recherche d’un spectacle se trouve ici déplacé ; l’homme, saisi par une révélation fulgurante, se prosterne dans un acte d’adoration et de prière. (…) La primauté de l’avènement théophanique décentre toute composition iconographique du contexte historique immédiat, n’en garde que le strict nécessaire pour reconnaître un événement ou le visage d’un saint à travers ses traits épurés par le céleste. Le visage est naturel sans être naturaliste. C’est pourquoi l’icône d’un vivant est impossible et toute recherche d’une ressemblance charnelle est exclue. La vue d’un iconographe passe par une ascèse, par le “ jeûne des yeux” (saint Dorothée) afin de coïncider avec celle de l’Église. Forme puissante de prédication et expression des dogmes, l’icône est soumise aux règles transcendantes de la vision ecclésiale. »
Paul Evdokimov, L’Art de l’icône. Théologie de la beauté (Desclée De Brouwer, 1972), p. 160-161 et 153-156.


suaire Pantocratoros

source: numéro de la Croix des 11 & 12 avril 2009

http://journal-en-ligne.la-croix.com/ee/lacr/_main_/2009/04/11/001/

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